V 1 à 12 : ministère de Jean-Baptiste
a.
Jean-Baptiste : v 1
b. Le message de Jean : v
2
c. Identité spirituelle de Jean : v 3
Matthieu ne cite qu’une partie de la prophétie d’Esaïe consacrée à Jean-Baptiste. Son but est de définir l’ordre de mission qu’il a reçu de Dieu. Luc la reprend entièrement et explique les effets que son message produira dans les cœurs : Luc 3,4 à 6. Par des images tirées de la topographie, il illustre le processus de nivellement auquel aboutit l’œuvre de la repentance. « Toute vallée sera comblée, toute montagne et toute colline seront abaissées. » Les différences qui séparaient les hommes seront reversées Tous, pour rencontrer le Seigneur, sont mis à égalité. Le misérable est relevé et l’orgueilleux humilié. « Ce qui est tortueux sera redressé et les chemins rocailleux seront aplanis. » L’œuvre de la repentance n’est pas optionnelle, mais primordiale. Elle prépare le chemin du Seigneur. Elle rend opérationnelle son œuvre dans les cœurs. Et il fallait, pour la signifier, que Jean paraisse et précède Jésus.
d. L’apparence de Jean : v 4
Matthieu précise un dernier détail au sujet de Jean : le contenu de ses repas. Jean se nourrissait de sauterelles et de miel sauvage. Dans la classification lévitique, les sauterelles étaient considérées comme des animaux purs, propres à la consommation : Lévitique 11,22. Si particulier que soit Jean, il ne faisait rien qui soit condamnable par la loi. Détaché du monde, il se suffisait de peu et témoignait de la vérité de la parole future de Paul : « Si donc, nous avons la nourriture et le vêtement, cela nous suffira : 1 Timothée 6,8. »
e. L’impact du ministère de Jean : v 5 et 6
A l’écoute de Jean, les foules ne parlementent pas. Les pécheurs tombent sur leurs genoux, confessent leurs péchés et, illico, se font baptiser dans le Jourdain. Lorsque l’Esprit de Dieu agit, il n’y a plus de discussion. La seule chose qui préoccupe les âmes est de savoir ce qu’elles doivent faire pour être sauvées : cf Actes 2,37. Qui cherche à négocier avec Dieu n’a pas encore compris dans quelle situation il se trouve. Hormis la repentance, il n’y a aucun terrain d’entente possible entre le Dieu saint et le pécheur. Heureux celui qui le comprend... et qui le vit ! « La tristesse selon Dieu produit une repentance qui conduit au salut et que l’on ne regrette jamais, tandis que la tristesse du monde produit la mort : 2 Corinthiens 7,10. »
Il ne suffisait pas, pour
manifester son adhésion au message de Jean, de confesser ses péchés. Les
pécheurs qui se repentaient le signifiaient par un engagement précis. Ils se
faisaient baptiser par Jean dans les eaux du Jourdain. L’Ecriture ne nous dit
pas où Jean a puisé son inspiration pour imposer une telle exigence. Mais le
baptême faisait partie intégrante de la mission qu’il a reçue : Jean 1,33. Les évangélistes le décrivent comme un acte
prophétique. Il est administré en vue du pardon des péchés : Marc 1,4 ; Luc 3,3. Le
baptême d’eau n’est cependant pas une fin en soi. Il prépare le peuple à la
venue de Jésus et annonce celui, plus décisif, qu’il initierait : le
baptême du Saint-Esprit : Actes 1,5.
f. Le fruit de la repentance : v 7 à 12
Devenu un phénomène en Israël,
Jean n’attira pas à lui que le bas peuple. Un grand nombre de pharisiens et de
sadducéens, partis qui formaient l’élite pieuse du pays, vinrent aussi vers lui.
Jean, qui les avait côtoyés, les connaissait. Il savait quelle fierté les
habitait. Aussi, se devait-il de s’adresser à eux en particulier. Il ne fallait
pas que ses visiteurs se méprennent sur son intention. Le baptême qu’il
pratiquait n’était pas un rite religieux supplémentaire, à inscrire dans son
portefeuille de mérites. Il exigeait une condamnation sans appel de soi, de ses
actes et de ses attitudes mauvaises. Jean allait utiliser pour leur parler le
seul langage qui convenait : celui de la rudesse. Apprenons de la sagesse
et de l’intelligence de Jean.
« Races de vipères… »
Sans précaution aucune, Jean débute
sa harangue en signifiant à ses visiteurs leur identité spirituelle. Juifs
pieux, ceux-ci se réclamaient d’Abraham, le père de la nation. Ils se prenaient
pour l’élite du peuple choisi. Jean détruit leur illusion. Les pharisiens et
les sadducéens ne font pas partie de la race élue, mais de celle du serpent.
Jean ne sera pas le seul à s’adresser à eux de la sorte, Jésus le suivra plus
tard : Jean 8,44. En abordant ses visiteurs
sous cet angle, Jean opte pour un message qui vise le cœur du problème qui
existe entre eux et Dieu. La repentance n’est pas nécessaire en priorité à
cause des œuvres mauvaises qu’ils auraient pu pratiquer. Elle l’est parce que, dans
leur nature fondamentale, ils portent les caractéristiques de l’ennemi de Dieu.
C’est à cause de ce qu’ils sont que les pharisiens et les sadducéens doivent se
repentir, non d’abord pour ce qu’ils font. La parole de Jean vaut pour eux, et
pour tous les gens religieux dans le monde. La vraie filiation d’Abraham ne se
transmet pas par le sang, mais par la foi et l’esprit qui l’habitaient.
En-dehors d’elle, nous sommes tous de la race de la vipère. C’est sur ce point
que doit se construire notre discours invitant les hommes à se préparer à
recevoir le salut.
« Qui vous a appris à fuir
la colère à venir ? »
Après avoir décliné l’identité
spirituelle de ses visiteurs, Jean les interpelle par une question tout aussi
directe. Le but de Jean est de les sonder sur leur motivation. Qu’est-ce qui
pousse les pharisiens et les sadducéens à venir à lui ? Quel sentiment,
quelle préoccupation les habite ? Le message que proclame Jean est sans
ambigüité. Il appelle chacun à un revirement radical, une rupture totale avec l’être
du passé. Est-ce là ce que ses visiteurs veulent signifier en se mêlant à la
foule des pécheurs venus de toute la Judée ? Jean en doute. Il perçoit
derrière la démarche des religieux une raison qui n’est pas en phase avec la
vérité. Les pharisiens et les sadducéens ne sont pas prêts à affronter le
jugement de Dieu sur eux. Ils cherchent, une fois de plus, en imitant les
pécheurs, à s’en tirer à bon compte. Ils se conforment à l’extérieur à ce qui
est demandé par Jean (le baptême), mais, à l’intérieur, ils ne reviennent sur
rien. Qu’ils n’espèrent pas ainsi échapper à la colère ! Aucun rite
pénitentiel ne saurait remplacer une vraie repentance. Seul celui qui se
condamne lui-même échappe à la condamnation de Dieu.
La repentance n’a de sens que si
elle est perçue à la lumière du jugement de Dieu. Celui qui regrette le mal qu’il
a fait, sans mesurer sa gravité à la lumière de la justice et de la sainteté de
Dieu, fait bien, mais pas assez. Car ce que nous devons craindre par-dessus
tout n’est pas le préjudice que nous avons fait subir aux autres, mais la
colère que Dieu ressent à l’égard du péché. David l’a compris au jour de sa
repentance par suite de son adultère. « J’ai péché contre toi, contre
toi seul, dira-t-il à Dieu, j’ai fait ce qui est mal à tes yeux. C’est pourquoi
tu es juste dans tes paroles, sans reproche dans ton jugement : Psaume 51,6. » Jésus abondera un peu plus
tard dans le sens de Jean : « Moi, je vous dis : tout homme
qui se met en colère contre son frère mérite de passer en jugement ; celui
qui traite son frère d’imbécile mérite d’être puni par le tribunal, et celui
qui le traite de fou mérite d’être puni par le feu de l’enfer : Matthieu 5,22. » Relativiser notre péché est
sans nul doute la séduction spirituelle la plus grande !
Produisez donc du fruit qui
confirme votre changement d’attitude
La présence des pharisiens et des
sadducéens dans la file des pécheurs qui se rendaient chez Jean pour se faire
baptiser n’était pas en elle-même une preuve de l’authenticité de leur désir de
se repentir. Le cœur de l’homme est si fourbe qu’il peut tout singer, y compris
la vraie piété. Il n’y a qu’une seule chose qui puisse attester la véracité d’un
changement profond de mentalité : le fruit qui en découle. Qui ne s’éloigne
pas de l’iniquité, tout en invoquant le Seigneur, y ajoute un nouveau péché
plus grave encore : l’hypocrisie. Les actes nouveaux sont ce qui témoigne
le mieux du revirement profond qui s’est opéré en nous. L’application de la
repentance diffère selon chaque cas, comme le rapporte Luc : Luc 3,10 à 14. Mais si elle est absente des vies, on a
le droit de douter de sa réalité. Ne soyons donc pas trop rapide pour légitimer
la démarche d’un homme qui dit se repentir, surtout s’il est religieux. Laissons
le temps et les actes nous convaincre de la sincérité de sa conversion. Car,
comme le dira Jésus plus loin : « Ceux qui me disent :
Seigneur, Seigneur ! n’entreront pas tous dans le royaume des cieux, mais
seulement celui qui fait la volonté de mon Père céleste : Matthieu 7,21. »
Et ne vous avisez pas de dire en
vous-mêmes : Nous avons Abraham pour ancêtre !
A l’idée de comparaître devant Dieu
pour être jugé, la réaction naturelle de l’être humain est de trouver en soi
des éléments qui le rassurent. La fierté des pharisiens et des sadducéens était
d’être les descendants physiques d’Abraham, l’élu de Dieu. A cause de ce fait
objectif, ils se disaient en eux-mêmes qu’ils n’avaient rien à craindre. Dieu
ne pouvait être que bienveillant à leur égard. Tous les êtres religieux pensent,
avec des nuances, de la sorte. La fierté de Saul de Tarse, avant qu’il ne
rencontre Jésus, reposait sur les mêmes présupposés : Philippiens 3,4 à 6. Pour d’autres, la conviction d’être
dans les faits meilleurs que leur voisin impie leur suffit : cf Luc 18,10 à 12. Cette attitude d’autojustification
viscérale de l’homme religieux est à l’opposé de l’esprit qui anime celui qui
se repent. La repentance se produit au moment même où nous confessons ne plus
avoir de terrain sur lequel nous tenir fièrement debout devant Dieu. Le
pharisien adopte cette position devant Dieu ; le pécheur, quant à lui n’ose
pas même lever les yeux vers le ciel. La différence de comportement tient à une
seule chose : ce que chacun se dit à lui-même en cet instant. Quels sont
les sentiments qui nous animent lorsque nous nous approchons de Dieu ?
Sommes-nous dans l’émerveillement de la grâce dont nous sommes l’objet ?
Ou venons-nous devant lui avec l’offrande impure de nos mérites personnels ?
De ces attitudes dépend l’accueil qui nous sera réservé !
En effet, je vous déclare que de
ces pierres, Dieu peut faire naître des descendants à Abraham
Forts de leur origine, les
pharisiens et les sadducéens se pensaient en sécurité face à la colère à venir.
Ils sont le peuple élu de Dieu. Le Talmud, auquel ils se référent, n’enseigne-t-il
que seuls les païens tomberont au jour du jugement ? Ils n’avaient donc
rien à craindre. Jean met ici à bas leur fausse assurance. Bien que descendants
d’Abraham, ses visiteurs ont, comme les autres, du souci à se faire face à la
justice de Dieu. Ils ne sont prémunis en rien de la condamnation qui pèse sur
eux à cause de leurs péchés. La voie de la repentance leur est nécessaire comme
à n’importe qui d’autre dans le monde. Pour ce qui est des promesses faites à
Abraham au sujet de sa postérité, ils n’ont pas à s’inquiéter. Elles s’accompliront
avec ou sans eux. Car Dieu a le pouvoir de susciter des fils au patriarche d’éléments
qui paraissent à priori inappropriés pour ce but.
L’histoire donnera raison à Jean.
Par Jésus-Christ, des incirconcis de toute nation vont, par la foi, intégrer le
peuple de Dieu. Ils seront accueillis comme de vrais fils et filles d’Abraham. Il
n’y a plus ici de Juif ou de non-Juif qui compte. « Si vous appartenez à
Christ, dit Paul, vous êtes la descendance d’Abraham et vous êtes héritiers
conformément à la promesse : Galates 3,28-29. »
Déjà, la hache est mise à la
racine des arbres
Si, par Jésus, le salut de Dieu
est entré dans le monde, avec lui commence aussi le jugement. Le vieux Siméon l’avait
annoncé à Marie : « Cet enfant est destiné à amener la chute et le
relèvement de beaucoup en Israël et à devenir un signe qui provoquera la
contradiction : Luc 2,34. » Les
pharisiens et les sadducéens étaient des experts dans le paraître. Tous leurs
actes extérieurs avaient pour objet de les embellir aux yeux des autres et de
les faire passer pour des hommes pieux et justes. Mais, s’ils pouvaient tromper
les foules, Dieu n’était pas dupe de la réalité qui les habitait. Telle une
hache qui s’attaque à la racine des arbres, le jugement de Dieu ne se porte pas
sur les actes, mais sur les motivations qui en sont la cause cachée. A ce propos,
Jésus se montrera parfaitement lucide à leur sujet : « Malheur à
vous, spécialistes de la loi et pharisiens hypocrites, leur dira-t-il, parce
que vous nettoyez l’extérieur de la coupe et du plat, alors qu’à l’intérieur
ils sont pleins du produit de vos vols et de vos excès. Pharisien aveugle !
Nettoie d’abord l’intérieur de la coupe et du plat, afin que l’extérieur aussi
devienne pur : Matthieu 23,25-26. »
La 1ère mission de Jésus est de faire entrer les élus dans le
royaume de Dieu. C’est le côté bienheureux de son mandat. Mais celui-ci a un
revers. Ceux qui, par leurs dispositions, sont inaptes à en faire partie, en
sont retranchés. « Tout sarment qui est en moi et qui ne porte pas de
fruit, il (le vigneron) l’enlève… Si quelqu’un ne demeure pas en moi, il est
jeté dehors comme le sarment et il sèche ; puis on ramasse les sarments,
on les jette au feu et ils brûlent : Jean 15,2 et
6. » Il nous faut apprendre à nous juger nous-mêmes à la
lumière de la vérité qui est en Jésus. Si nous le faisons, nous évitons à Dieu
de le faire pour nous : 1 Corinthiens 11,31.
Tout arbre donc qui ne produit
pas de bons fruits sera coupé et jeté au feu
C’est sur la base d’un seul
critère de sélection que le jugement de Dieu se fait. Là où il y a la présence
de bons fruits, l’arbre est préservé. Là où ils font défaut, il est coupé. Le
but de tout horticulteur ou vigneron est de récolter du fruit : Jean 15,1-2. Tout plant qui n’en porte pas, malgré les
bons soins de son propriétaire, occupe le terrain inutilement : Luc 13,7. Le fruit est ainsi ce qui donne à l’arbre à
la fois sa raison d’être et son identité. C’est par son fruit que l’on
reconnaît l’arbre : Matthieu 7,16. Les œuvres
de la chair sont faciles à reconnaître, dira Paul : Galates 5,19 à 21. Elles portent toutes la marque de
la corruption et de la déchéance humaine. Ce qui procède de l’Esprit est tout
autre. C’est une production qui n’a pas sa source en l’homme, mais en Dieu par
l’Esprit : Galates 5,22. Il en résulte des œuvres
bonnes à la louange de la gloire de Dieu et de sa grâce. Que tout ce qui
résulte de ma vie soit un fruit qui confesse ton nom, ô Dieu !
Moi, je vous baptise d’eau en vue
de la repentance
Bien que serviteur de Dieu choisi
dès sa naissance et précurseur du Messie, Jean exerçait un ministère qui avait
ses limites. Il pouvait préparer le peuple à accueillir le Messie par la
repentance, mais son mandat s’arrêtait là. Il n’avait ni le pouvoir de le
sauver, ni de le régénérer. Cette capacité était du ressort du Christ seul. A l’image
de Jean, il est essentiel que chaque serviteur de Dieu ait une juste notion de
son identité et de la mission qui lui est confiée. Interrogé sur le premier
point par les Juifs venus de Jérusalem pour le questionner à ce sujet, Jean y
répondra clairement. Il n’est ni le Messie, ni Elie, ni le prophète, mais la
voix annoncée par Esaïe, qui crie dans le désert : Jean 1,19 à 23. Le fait de savoir qui nous sommes et ce pour quoi
nous avons été envoyés est salutaire et libérateur. Cette connaissance préserve
de bien des écueils. Elle nous évite de prendre la place de l’Esprit de Dieu
dans notre service auprès des hommes et nous procure liberté et assurance. Elle
nous sauve de la vantardise coupable et de la fausse humilité paralysante. Rien,
dans l’œuvre de Dieu, ne remplace le Messie. Mais rien également ne la fait
mieux avancer que le serviteur de Dieu qui, à son service, remplit le rôle pour
lequel Dieu l’a choisi.
Mais celui qui vient après moi
est plus puissant que moi et je ne suis pas digne de porter ses sandales
Si Jean a conscience des limites
inhérentes à son ministère, il sait que celui qui le suit ne sera prisonnier
d’aucune impuissance. Sur le plan humain, Jean et Jésus sont cousins. Mais, sur
le plan spirituel, Jean sait qu’un gouffre le sépare de Jésus. Aussi utile
puisse être Jean pour l’œuvre de Dieu, ce qui est capital ne se fera que par Jésus.
Malgré l’importance qu’a Jean dans le plan de Dieu, il le sait, il n’en est pas
la pièce maîtresse : c’est Jésus. Jésus rendra un jour honneur à Jean
disant que, parmi les hommes qui sont nés de femmes, il n’en a pas paru de plus
grand que Jean : Matthieu 11,11. L’avis de
Jean sur Jésus nous est donné ici. Jésus est pour Jean une personne d’une telle
hauteur qu’il n’est pas digne de porter ses sandales. L’humilité de Jean à l’égard
de Jésus n’est pas feinte. Elle procède d’une vision juste de la réalité. Jean
sait qui il est et sait qui est Jésus par rapport à lui. L’humilité est
compagne de la vérité. Après s’être mesuré à Jésus, Jean nous dit ensuite pour
quelle raison précise celui-ci le dépasse.
Lui, il vous baptisera du
Saint-Esprit et de feu
Rien ne fait mieux percevoir la différence
de nature qui sépare Jean de Jésus que l’œuvre particulière que celui-ci introduira
par sa venue. Jean baptise d’eau, mais Jésus baptisera les hommes d’Esprit-Saint
et de feu. Jean peut plonger un corps humain dans l’eau. Seul Jésus a le
pouvoir d’immerger une âme dans la vie même de Dieu. Le baptême que Jésus initie
dépasse les frontières de l’humain. Il est une opération divine qui fait entrer
de plein pied celui qui en bénéficie dans la sphère du royaume de Dieu. Le
baptême du Saint-Esprit se produira pour les disciples à la Pentecôte : Actes 1,5. Il est l’acte fondateur de la vie
chrétienne, celui par lequel tout commence. Jean précise que le baptême que
Jésus pratiquera sera aussi un baptême de feu. Le feu est, dans l’Ecriture,
toujours synonyme de jugement. Qui n'est pas baptisé par l’Esprit par Jésus le
sera par le feu. Qui que nous soyons dans ce monde, nous ne pourrons échapper
aux conséquences de la venue de Jésus. Il sera soit notre Sauveur, soit notre
Juge.
Il a sa pelle à la main ; il
nettoiera son aire de battage et il amassera son blé dans le grenier, mais il
brûlera la paille dans un feu qui ne s’éteint pas.
Nous arrivons ici à la conclusion
du discours de Jean aux pharisiens et aux sadducéens. La gravité des propos de
Jean a pour objet de souligner le caractère critique que revêt la venue de
Jésus pour ses auditeurs. Par lui, un tri, une séparation irréversible vont s’opérer
parmi les hommes. La venue de Jésus inaugure la grande moisson qui se produira
à la fin des temps. En ce jour, les anges, dira Jésus, viendront séparer les
méchants d’avec les justes : Matthieu 12,49.
Assis sur son trône, le Fils de l’homme séparera les uns des autres, comme le
berger sépare les brebis des boucs. Les uns recevront en héritage le royaume
que le Père céleste leur a préparé dès la fondation du monde. Les autres seront
jetés dans le feu éternel préparé à l’origine pour le diable et ses anges :
cf Matthieu 25,31 à 46. Au vu des conséquences éternelles
qu’il entraîne dans la vie de ses auditeurs, le message de Jean est crucial. La
repentance est le moment de vérité pour chacun. Il est un carrefour qui l’oriente
pour toujours, soit vers une destination bienheureuse, soit vers le malheur
éternel. Serais-je avec le bon grain dans le grenier du Seigneur ? Ou avec
la paille, voué à la fournaise insatiable ?
V 13 à 17 :
baptême de Jésus par Jean
Le discours de Jean aux
pharisiens et sadducéens avait un but. Jean voulait que personne, sous prétexte
de religiosité, ne se sente à l’aise face à la perspective du jugement de Dieu.
Le vernis religieux qui couvrait la vie de ses auditeurs ne tiendrait pas face
au feu auquel ils seraient exposés. Il leur fallait être revêtu d’une autre
justice que celle dont ils s’habillaient. Destiné à tous les pécheurs, le
message de Jean avait comme objet de les enfermer tous dans la désobéissance
pour que la grâce soit donnée à tous. Un seul type de personne n’était pas
concerné par l’appel à la repentance de Jean : celui qui n’avait aucun
péché à confesser. Il n’existait qu’un seul être qui réponde à ce critère,
Jésus. Et le voici qui s’approche de Jean pour être baptisé.
La réaction de Jean à la vue de
Jésus est immédiate. Jésus n’est pas à sa place. Il n’a rien à faire dans la
file des pécheurs qui attendent leur tour pour se faire baptiser. Ce n’est pas
lui, Jean, qui doit baptiser Jésus, mais l’inverse. Car, bien que mandaté par
Dieu par ce service, Jean ne se situe pas, contrairement à Jésus, hors de la
catégorie des fautifs. La demande de Jésus à Jean est un tel contresens que
celui-ci ne peut se résoudre à y accéder sans protester. Le Seigneur le
rassure. Il sait qui il est et ce qu’il fait. Que Jean soit étonné par sa
démarche ne le surprend pas. Il n’a pas fini de l’être. Rien, en effet, dans
l’histoire de l’humanité de Jésus n’est conforme à la logique. Quel intérêt
pour lui-même un Dieu a-t-il à se faire homme ? Quel gain trouve-t-il à
s’assimiler aux pécheurs ? Enfin, quel bienfait retire-t-il à subir à leur
place la sentence que méritent leurs forfaits ? Tout est contraire à la
raison ! Mais la folie de Dieu est plus sage que les hommes et sa
faiblesse plus forte qu’eux : cf 1 Corinthiens 1,25.
Jésus ne demande pas à Jean de le comprendre, mais de se soumettre à sa volonté.
C’est pour lui ici la meilleure façon de reconnaître sa seigneurie. Imitons-le !
Car Jésus ne se trompe jamais. Tout ce qu’il fait est toujours en accord avec
son dessein. La foi consiste à le croire envers et contre toutes les
apparences !
Sur l’insistance de Jésus, Jean
le baptisa. Il le fit sans que celui-ci n’ait à confesser aucune faute. Innocent,
Jésus anticipe ici ce que sera le sommet de sa mission. Il est venu pour s’identifier
aux pécheurs et, tel un agneau muet, s’offrir en sacrifice pour leurs péchés. Dès
le début de son ministère publique, Jésus signifie sa fin. Avec lui, l’heure
effective de la rédemption a sonné. C’est vers lui que, pour leur salut, les
pécheurs doivent se tourner. Si Jésus est silencieux, le ciel ne l’est pas. Il
s’ouvre et l’Esprit de Dieu descend sur Jésus sous la forme d’une colombe.
Puis, le Père fait entendre sa voix. Il rend témoignage au Fils, l’objet de son
affection et de son plaisir éternels. Ce double témoignage va désormais
accompagner Jésus. Il est la raison du caractère si singulier de toute sa vie. Les
hommes n’ont plus à chercher où se trouve leur Messie. Il est ici. Il est celui
qui porte les marques de la présence et de la puissance de Dieu. Car personne
ne peut faire ce que Jésus fera si Dieu n’est avec lui.
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